Le 18 janvier 1889, Henri Saunier, garde-frein1 à la Compagnie des Tramways de la Sarthe, décède à la gare de Parigné-l’Evêque dans un tragique accident. Léon, son jeune frère âgé de seize ans, atteint de nanisme, et dont il avait la charge, se retrouve seul…
Tragique accident à la gare de tramways de Parigné l’Evêque
Le samedi 19 janvier 1889, le quotidien La Sarthe retranscrit une dépêche télégraphiée la veille au journal l’Avenir2 :
« PARIGNE-L’EVEQUE. – On lit dans l’Avenir :
La Sarthe du samedi 19 janvier 1889
On nous télégraphie de Parigné l’Evêque, à la date du vendredi 18 janvier :
Ce matin, au passage du premier train, un accident grave s’est produit à la gare des tramways.
Un employé, le nommé X…. ayant voulu remonter sur le marchepied d’un wagon au moment où le train se mettait en marche, est tombé et a glissé sur le rail.
Il a eu une jambe sectionnée comme au couteau. »
Le lendemain, La Sarthe publie un article de deux cent soixante-sept mots précisant les détails de l’accident survenu à la gare de tramways de Parigné l’Evêque :
« Nous avons hier reproduit une dépêche annonçant qu’un garde-frein de la compagnie des tramways avait été victime d’un grave accident, à la station de Parigné-l’Evêque.
La Sarthe du dimanche 20 janvier 1889
Nous recevons aujourd’hui les détails complémentaires qui suivent :
Hier vendredi, vers 8 heures moins un quart du matin, le train n°12, de la Chartre au Mans, allait quitter la station de Parigné-l’Evêque.
Le garde-frein, Saunier Henri, âgé de 23 ans, était à son poste, en queue de train, sur la plate-forme d’une voiture de première classe, et le conducteur venait de donner le signal du départ. – C’est le moment que choisirent deux voyageurs pour changer de voiture.
Saunier qui avait vu leur mouvement, s’apercevant qu’ils avaient laissé dégrafée la chaînette d’appui du wagon qu’ils venaient de quitter, voulut aller le rattacher et, bien que le train fût déjà en marche, il sauta sur le sol et courut au wagon.
En y arrivant, il saisit la chaînette et essaya de l’accrocher, sans cesser de courir à côté du train. Mais, en ce moment, il fut heurté par le marchepied, renversé sur le sol, et ses deux jambes, s’étant trouvées prises sur les rails, furent littéralement coupées par les roues des deux dernières voitures.
Le malheureux conducteur fut, immédiatement après l’accident, relevé par les soins des employés du tramway et du gendarme de planton à la gare, et transporté chez M. Lemaître, aubergiste, où il reçut les soins de M. Le docteur Fournier, qu’un exprès avait été cherché aussitôt.
Mais la gravité de ses blessures ne permettait pas de le sauver et, vers 11 heures du matin, il rendit le dernier soupir.
Cet effroyable accident ne peut être attribué qu’à l’imprudence de celui qui en a été la victime. Toutes les voitures du tramway communiquant entre elles, rien ne lui était plus facile que d’aller raccrocher la chaînette sans descendre du train.
L’inhumation de Saunier aura lieu à Semur, sa commune natale.
Le malheureux était célibataire, mais il avait à sa charge son jeune frère, âgé de 16 ans. »
La victime : Henri Florent Saunier
Henri Florent Saunier nait le 3 janvier 1863 dans une commune rurale du Perche, Semur-en-Vallon. Son père Constant est maçon et sa mère, Marie Bignon, couturière. Henri est le cadet d’une fratrie composée de quatre garçons : Constant, Gustave et Léon le benjamin.
Son frère ainé, Constant meurt le 8 mai 1885, il n’a que vingt-cinq ans. En juillet 1886, Constant, le père d’Henri, décède à l’âge de cinquante-cinq ans. Sa mère, Marie, disparait cinq mois plus tard, âgée de cinquante-deux ans. Léon, le benjamin, a treize ans et est atteint d’achondroplasie (nanisme). Henri qui est garde-frein à la Compagnie des Tramways de la Sarthe devient le tuteur de Léon. Ils résident tous deux au Mans, 77 rue Saint Gilles.
Après le tragique accident dont est victime Henri le vendredi 18 janvier 1889, Léon âgé de seize ans se retrouve seul…
Son jeune frère : Léon Clément Saunier
Le 18 janvier 1889, Léon perd son frère cadet et tuteur Henri Saunier. Son frère ainé est décédé en 1885 et ses parents en 1886. Il ne lui reste qu’un frère, Gustave qui est sabotier à Dollon, une commune rurale située à environ vingt kilomètres à l’est du Mans. Gustave et son épouse, Victorine Vassour, sont mariés depuis le 4 janvier 1887 et n’ont pas d’enfants. Ils accueillent Léon, et Gustave devient son tuteur.
A la fin de l’année 1892, Léon est convoqué pour ses classes. En raison de sa petite taille, Il est ajourné deux fois pour une durée d’un an, avant d’être classé dans les services auxiliaires en 1895. Il passe dans la réserve de l’armée active le 1er novembre 1896.
A la fin de l’année 1896, Léon réside à Paris, 13 rue du Cherche-Midi, où il exerce le métier de coiffeur. Il changera plusieurs fois de lieu de résidence mais restera toujours à Paris. Agé de cinquante ans, il épouse le 30 avril 1923, Julie Nouvel, une femme veuve âgée de 53 ans. A la fin de sa vie, il retourne avec son épouse dans la Sarthe et décède le 10 octobre 1954 à Semur-en-Vallon, à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Son épouse, Julie disparaitra trois ans plus tard, le 1er janvier 1958.
Sources :
VARRET, Laurence. Bibliographie de la presse française politique et d’information générale 1865 – 1944, 72 – Sarthe. Paris : Bibliothèque Nationale, 1978. 68 p.
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